lundi 3 janvier 2011

Bonne année 2011, et meilleurs voeux !


Henri Matisse, Le Bonheur de vivre, 1905-1906, huile sur toile, 175x241 cm, Merion, Barnes Foundation

samedi 25 décembre 2010

Joyeux Noël !


Giotto, L'Adoration des Mages, années 1310, Assise, San Francesco (basilique inférieure, transept Nord)

jeudi 9 septembre 2010

Botticelli, Bellini, Guardi...Chefs-d'œuvre de l'Accademia Carrara de Bergame : exposition à Caen, Musée des Beaux-Arts

Indiscutablement, Caen compte parmi les grands musées français en matière d'art italien. D'abord, bien entendu, pour ses collections permanentes comprenant de superbe Tura, Pérugin, Véronèse, Giordano ou Guerchin, mais aussi pour ses expositions temporaires. Après avoir accueilli la seconde étape de Splendeur de Venise en 2006, le musée normand introduit le public français à une collection qu'il connaît mal, voire pas du tout, l'Accademia Carrara de Bergame. Depuis plusieurs années s'intensifie le phénomène d'expositions itinérantes basées sur les œuvres de bâtiments fermés pour travaux, comme c'est le cas du musée italien actuellement. Hélas, l'aspect purement marketing, privilégiant le financier et le spectaculaire, de certaines de ces expositions a nuit à la démarche, au point de susciter désormais la suspicion auprès des connaisseurs. Ils auraient pourtant tort de ne pas aller à Caen, et de se laisser tromper par le terme "chefs-d'œuvre", qui ne cache rien de tapageur. Bien au contraire, on aurait du mal à formuler des reproches à cette exposition qui frise la perfection, ou du moins s'impose comme l'une des plus réussies en France cette année dans le domaine de la peinture ancienne. Grandes salles baignées d'un éclairage idéal pour apprécier les tableaux sans ombre ni reflet, accrochage dense mais aéré où les grands noms voisinent avec les artistes à la renommée plus locale, propos très clairs destinés à une large audience sans oublier les spécialistes_ ou comment un musée dit de province pourrait bien donner des leçons à certaines institutions parisiennes !




Pourquoi montrer les œuvres bergamasques à Caen ? Ce choix peut s'expliquer, entre autres, par la genèse analogue des deux institutions, héritières des idéaux des Lumières et à la pointe de l'histoire muséale moderne. Peu avant que le Consulat n'institue des collections dans les régions alors françaises, le comte Giacomo Carrara lègue à sa mort en 1796 ses biens artistiques, en souhaitant la construction d'un bâtiment adéquat (associé à un lieu d'enseignement des beaux-arts, toujours actif). Édifiée entre 1804 et 1810, l'Accademia Carrara comprend dès le départ de grands polyptyques, témoignage du regain d'intérêt pour les "primitifs" du Quattrocento. Contrairement à ce qu'on pourrait croire, les panneaux montrés à Caen ne sont pas parvenus à l'Accademia suite aux suppressions napoléoniennes ; certains furent acquis de sanctuaires bergamasques tard au XIXe siècle, voire au début du XXe. Avant même les campagnes révolutionnaires, la réfection des églises ou simplement le désintérêt sonnèrent le glas de ces polyptyques, condamnés à être fragmentés, leurs éléments dispersés ou parfois perdus. La première salle du parcours tente de reconstituer, autant que faire se peut, ces retables complexes, à l'occasion placés au-dessus d'une estrade simulant l'autel. Bien que des artistes locaux aient surmonté le défi de ces grandes machines, les religieux ont souvent fait appel à des peintres d'autres cités de Lombardie et de Vénétie : une activité picturale reflétant la position géographique de Bergame, tout comme son assujettissement à la République de Venise dès 1428. Fort actif, le Vénitien Bartolomeo Vivarini fournit les églises de la ville et ses environs avec plusieurs retables dont le Polyptyque de Scanzo (signé et daté 1488). Chez Vivarini persiste une écriture gothique, par ses couleurs fraîches et vives sur fond d'or, ainsi qu'un graphisme marqué, singulier pour un artiste de Venise. Peu après triomphera la noblesse silencieuse de Giovanni Bellini, ou plutôt ses épigones : le Parmesan Cristoforo Caselli dit Le Temperelli dans son Polyptyque de saint Pierre (vers 1495) reprend des prototypes du maître non sans raideur, alors que le Triptyque de saint Jacques (signé et daté 1506) par Francesco di Simone da Santacroce médite davantage sur la dernière manière, fondue et allusive, croisée à une influence de Cima da Conegliano dans les contours découpés. Le Milanais Bergognone se montra perméable à ce courant vénitien pour ses vues de ciel et ses paysages, tout en proposant une facture alternative. Comme la plupart de ses contemporains lombards, il assimila la leçon de Léonard, perceptible dans les expressions songeuses, les chairs modelées par le clair-obscur et la finesse des chevelures, donnant à ses figures un détachement proprement sacré.

Le long séjour bergamasque de Lorenzo Lotto, de 1513 à 1525, reste l'une des phases d'activité les plus fécondes de cet artiste itinérant, qui insuffla ainsi une nouvelle vie à la scène artistique locale. Malgré une amputation précoce, Le Mariage mystique de sainte Catherine (signé et daté 1523) s'impose comme une des créations les plus heureuses de Lotto à Bergame. Portrait fier à l'indicible mélancolie, courbes gracieuses et bizarres à la fois du groupe principal, pâleur de l'ange s'avançant, appartiennent bien au langage ô combien génial du peintre vénitien. Nul doute qu'un artiste comme Previtali dut méditer l'art de Lotto dans sa Pentecôte (vers 1527-1528), dominée par un étonnant feu d'artifice rehaussant les couleurs jusqu'à les faire rougeoyer. Il faut plutôt invoquer la force chromatique de Titien ou l'équilibre formel de Raphaël pour La Déposition (signée et datée 1566) de Giovan Battista Moroni qui, s'il tend à un certain classicisme, n'en délaisse pas moins l'émotion juste, avec une objectivité digne de ses portraits. A la fin du XVIe siècle, la peinture religieuse bergamasque participe à l'élaboration du grand style des années 1600 par l'entremise de Giovan Paolo Cavagna : sa Vierge à la ceinture (signée et datée, vers 1591) s'articule autour d'une rencontre des sphères terrestre et céleste, comme il est de mise dans l'esthétique baroque, de même que certains portraits de dévots offrent des affinités avec Caravage, né pas si loin de Bergame...

Avec son legs, Giacomo Carrara inaugurait une longue tradition d'enrichissement du musée par dons privés. L'un des plus importants demeure celui de Giovanni Morelli, historien d'art surtout connu pour sa méthode d'attribution par critères morphologiques. Une méthode fondée sur le dessin des oreilles, selon ses pires détracteurs ! Si la pensée morellienne, nourrie par le positivisme de son temps, peut aujourd'hui être discutée, il n'en va pas de même de son goût artistique, d'une grande sûreté. Quelques-unes de ses acquisitions comptent d'ailleurs parmi les pièces maîtresses de l'Accademia Carrara : rien de moins que le Portrait de Lionello d'Este (1441 (?)) peint par Pisanello avec une obsession calligraphique pour les volumes du corps et les détails floraux, de sorte que son naturalisme passionné transforme l'image en emblème héraldique ; un Portrait de Julien de Médicis (vers 1478-1480), réalisé par Sandro Botticelli après la conjuration des Pazzi qui coûta la vie à ce frère cadet de Laurent le Magnifique en 1478, d'où l'absence et l'inexpressivité de celui qui n'est plus ; ou encore une Vierge à l'Enfant (signée, vers 1488) de Bellini, appartenant certes à un corpus pléthorique, mais d'une indéniable humanité dans le regard lourd de tristesse de la Madone et les membres potelés de son fils, devant un paysage de terraferma.

Outre ces chefs-d'œuvre incontestés se remarquent des tableaux injustement méconnus, fort touchants ou bien peu communs. Une Vierge à l'Enfant (vers 1476) de Neroccio di Bartolomeo de'Landi témoigne de ce conservatisme siennois qui résista tard aux modes florentines, pour conserver le fond d'or et les corps allongés, de rigueur dans ce milieu depuis Simone Martini. Habituellement un peu fade dans ses tableaux religieux, Marco Basaiti prouve son talent dans un Portrait de gentilhomme (signé et daté 1521), à peine inférieur aux effigies contemporaines de Titien, auquel il peut être comparé par la pose du modèle et la touche blanche de la chemise au milieu du velours noir ; quant au fond rocheux, il se rapproche plutôt de productions vénètes, de Bergame justement. Pareilles remarques s'appliquent à un portrait masculin de Cariani, ouvrant sur un paysage maritime, certainement lié à la puissance de Venise. Le Véronais Paolo Morando s'inscrit davantage à la suite de Giulio Romano, en particulier son Portrait de Margherita Paleologa, dans l'ampleur du vêtement d'apparat d'une noble dame. Mystérieuse et grotesque à la fois, une Figure allégorique (vers 1530-1540) n'en finit pas de déconcerter la critique : son attribution à Sodoma ne convainc guère et l'on peut même se demander s'il ne s'agit pas plutôt d'une œuvre exécutée en Italie du Nord à la fin du XVIe siècle, mélange de souvenirs de Giorgione et de trivialité populaire, dans la veine la plus crue de Niccolo Frangipane ou des Campi...Dans un registre très différent, le Portrait d'une jeune fille avec un éventail (vers 1740) de Giacomo Ceruti séduit par sa franchise et la simplicité de sa pose. Pourtant, le modèle ne dégage aucun charme. Surtout connu pour ses images de populations humbles, au point d'être surnommé Il Pitocchetto (le petit mendiant), Ceruti excelle ici à capter les apparences et les états d'âme de l'aristocratie par une touche fluide et tactile, trait de modernité qui fit comparer la toile à l'art de Degas ou Manet. Grand curieux, Morelli ne s'intéressa pas qu'aux peintres de son pays. Il réunit aussi des tableaux nordiques, parmi lesquels on peut citer un Roelant Savery, Paysage avec des chiens coursant un cerf (signé et daté 1626), où un drame sauvage se joue sous un ciel plombé à l'orée des bois ; mais aussi Le Satyre et le paysan (signé et daté 1662) dû à Barent Fabritius (frère de Carel), fable d'Ésope alors fort populaire et déjà illustrée par Jordaens, transposée en une véritable scène de genres aux vigoureux tons bruns, tirés de Rembrandt.




S'il est un domaine où le naturalisme bergamasque connut une grande renommée, c'est bien celui du portrait. Durant la Renaissance, le genre puisa d'abord dans les grands prototypes vénitiens : le prouve un Portrait de Giovanni Benedetto Caravaggi (signé, vers 1517-1520), où Cariani participe avec éclat au giorgionisme. La langueur de l'honnête homme sur un fond de paysage vert et montagneux, ces caractéristiques dérivent bien du maître de Castelfranco et du jeune Titien, mais Cariani opte pour une palette plus éteinte et une attitude moins fougueuse. Une génération plus tard, Giuseppe Belli s'affranchit de ces formules pour une approche sans égal. Avec brio, son Portrait du musicien Gasparo de Albertis (signé et daté 1547) crée un rythme formel pareil à celui sonore. Les lignes droites des livres empilés, du meuble à l'arrière-plan, du siège, de la partition et des bésicles, structurent avec une rigueur géométrique peu banale la composition. A ce réseau de verticales et d'horizontales s'opposent les plis du vêtement et surtout le visage froissé du personnage, l'air hagard, à mille lieux de toute convention ! La seconde moitié du XVIe siècle est dominée par la personnalité de Moroni, parvenant à une sobriété et une vérité jusqu'alors inégalées. Ses portraits d'hommes en noir et blanc offrent parfois des échos aux créations de Titien, mais ces personnages paraissent dans le plus grand dépouillement, comme si l'artiste renonçait à toute prétention personnelle pour parvenir_ ou du moins tenter_ à projeter l'essence même de leur être sur la toile. Un tel sacrifice ne mène cependant pas à la sècheresse, car cette déclinaison de teintes autour du gris relève de la virtuosité, surtout lorsque la trame fait vibrer la touche. Moroni se permet un peu d'affectation avec le Portrait d'une dame âgée de trente ans (vers 1570), quand il détaille la parure somptuaire et confère quelque beauté à sa bouche gourmande et ses yeux doux. Par contraste, le Portrait d'une noble dame âgée de dix-neuf ans (vers 1595), par Giovan Paolo Lolmo, délaisse l'enquête psychologique pour magnifier les riches atours, sans grande sensibilité.

Il faut attendre le XVIIIe siècle pour que le portrait bergamasque retrouve de sa grandeur, avec Giuseppe Ghislandi, dit Fra'Galgario. Tributaire d'une tradition bien ancrée, le moine peintre n'idéalise pas les traits d'Elisabetta Piavani Ghidotti, tout en brossant habilement les tissus : soyeux d'une étoffe bleutée, traits déliés des motifs floraux et bref coup de pinceau pour chaque cordon du corsage. Son travail de la pâte n'est pas moins sûr dans le Portrait d'un jeune peintre (vers 1732), dont la hardiesse de facture sied tout à fait à la pose décontractée de son collègue. Au même moment, Paolo Maria Bononimo livrait une image sans concessions de l'automne de la vie, à travers son Portrait de Zenobia Benaglio Morenzi (signé et daté 1737), vielle femme au visage plissé par ans et la lassitude, encore autoritaire, la main bien agrippée sur son chien...

La Venise du XVIIIe siècle fait office d'apothéose pour la fin du parcours. Le paysage tient une place de choix, avec toutes ses déclinaisons comme autant de représentations de la Sérénissime sur le déclin, en quête d'identité. Paysage avec des arches de roche, une cascade et des cavaliers d'Antonio Maria Marini, proche de l'art de Marco Ricci, participe à une vision contemplative mais inquiète de la nature, précurseure du romantisme. Renouvelant une tendance chère à Giorgione, la pastorale s'enrichit au XVIIIe siècle d'apports nordiques et français. Tandis que Francesco Zuccarelli décrit des scènes galantes sous un ciel clair, avatar des compositions de Watteau et ses suiveurs, son contemporain Giuseppe Zaïs, davantage tourné vers les Hollandais, préfère une matière brune et compacte. Un héritage du Nord se constate aussi dans les vues urbaines, ces fameuses vedute ; à la lumière un peu terne des toiles de Bernardo Bison, on préférera une œuvre de jeunesse de son illustre fils, Canaletto. Dans Le Grand Canal, avec au fond le pont de Rialto, vu depuis la Ca'Foscari (vers 1728), il n'hésite pas à prendre des libertés avec la topographie pour un meilleur effet optique. L'un des premiers à s'engager dans cette voie fut Lucas Carlevarijs, auteur également de scènes de genre telles que Réception d'un ambassadeur (vers 1710-1720), immortalisant un de ces événements pour lesquels les puissants de Venise se plaisaient à se mettre en scène. Tout aussi important que semble le moment, il n'égale pas la force d'attraction des petites compositions de Longhi, bien que purement anecdotiques. Comme d'autres tableaux de l'artiste, Le Ridotto (vers 1757-1760) jette un regard critique, subtil et ambigu, sur ses contemporains. Dans la cité de tous les plaisirs, on ne trouve alors qu'une salle de jeu légale, ouverte seulement au moment du carnaval. D'où ces masques, signes de festivités, mais aussi pour cacher les visages des joueurs qui s'adonnent à des pratiques alors peu morales.

De même que la déliquescence de toute une société transparaît à travers une simple scène, on a voulu interpréter la peinture de ruines comme le reflet d'un monde prêt à s'effondrer. Pas tant l'arc de Titus revu avec quelque fantaisie par Bernardo Bellotto, inspiré par la peinture de Giovanni Paolo Pannini et l'anticomanie de Piranèse, que les caprices de Francesco Guardi. L'arc délabré sur une rive revient fréquemment dans son œuvre, chargé d'une forte signification symbolique, accrue lorsque l'architecture antique enchâsse une ogive, issue d'un Moyen Âge alors forcément lié à la ruine. Même quand il dépeint la Cité des Doges avec plus ou moins d'exactitude, Guardi reste fidèle à une atmosphère fantastique, transformant la ville en théâtre brumeux rempli de hiéroglyphes à l'apparence humaine : de la distinguée façade de San Giorgio Maggiore aux élévations spectaculaires de la Piazzetta, toujours la même décrépitude, l'effritement inéluctable des symboles de la fierté vénitienne bientôt accaparés par le tourisme. Guardi meurt en 1793, soit trois ans avant le legs Carrara. Une page de l'histoire de l'art venait de se tourner, tandis que les musées entamaient leur grande aventure.

Botticelli, Bellini, Guardi...Chefs-d'œuvre de l'Accademia Carrara de Bergame, du 27 mars au 19 septembre 2010 Musée des Beaux-Arts de Caen Le Château 14000 Caen. Ouvert tous les jours sauf le mardi de 09H30 à 18H00. Tarif plein : 3 euros (exposition temporaire) / 5 euros (exposition temporaire + collections permanentes) ; réduit : 2 euros (exposition temporaire) / 3 euros (exposition temporaire + collections permanentes). Catalogue collectif (Éditions Hazan, 2010, 220 pages, 32 euros).

Références photographiques :
- Bartolomeo Vivarini, Polyptyque de Scanzo : La Trinité entre deux anges (lunette), 1488, tempera sur panneau, 78x131 cm, Bergame, Accademia Carrara
- Pisanello, Portrait de Lionello d'Este, 1441 ?, tempera sur panneau, 28x19 cm, Bergame, Accademia Carrara
- Giacomo Ceruti, Portrait d'une jeune fille avec un éventail, vers 1740, huile sur toile, 65x54 cm, Bergame, Accademia Carrara
- Cariani, Portrait d'un gentilhomme, huile sur toile, vers 1535, Bergame, Accademia Carrara
- Fra'Galgario, Portrait d'un jeune peintre, vers 1732, huile sur toile, 76x65 cm, Bergame, Accademia Carrara
-Pietro Longhi, Le Ridotto, vers 1757-1760, huile sur toile, 61x49 cm, Bergame, Accademia Carrara

jeudi 8 juillet 2010

Le Forme del moderno Scultura a Ca'Pesaro. Da Medardo Rosso a Viani, da Rodin ad Arturo Martini : exposition à Venise, Ca'Pesaro

Quand un musée organise une exposition temporaire uniquement à partir de ses collections, on peut se demander pourquoi préférer cette option à celle d'un parcours permanent. Pour le musée vénitien d'art moderne, ce choix se justifie tout à fait : en dépit d'espaces généreux, le grand nombre de sculptures conservées par la Ca'Pesaro (plus de 400) ne permet pas la présentation intégrale du fonds. Le public a heureusement la chance, durant quelques mois, de découvrir des pièces célèbres ou peu connues, étudiées sous l'angle de la forme à travers quatre salles du palais.

A première vue, les œuvres réunies dans le grand couloir d'entrée entretiennent peu de relations entre elles. En y regardant de plus près, la muséographie montre quelque subtilité, les pièces apparentées se faisant face pour Polarità del corpo. Deux statues fortement liées à l'histoire esthétique de l'Italie dialoguent : un Nudo di Susanna (o Susanna) (1909) de Giuseppe Graziosi, marbre lisse un peu académique, dans la lignée de la sculpture maniériste florentine, avec le Pugile de Napoleone Martinuzzi, écho moderne à un célèbre antique, Le Pugiliste du Museo Nazionale Romano, empreint de la même tension musculaire dans le métal savamment travaillé pour imiter la chair meurtrie. Le bronze reste un matériau par excellence de la sculpture au XXe siècle, dont use Michael Noble pour une Marisa (1953) lorgnant sur Giacometti avec sa silhouette longue et émaciée comme les aspérités multiples du métal. Ces effets plastiques peuvent aussi relater une histoire funeste : l'apocalypse nucléaire annihilant l'Uomo atomizzato (o Uomo di Hiroshima) d'Agenore Fabbri (1959) dont la chair se désagrège et la pose se fige_ terrible avatar, hélas trop réel, des métamorphoses mythologiques. Avec Alberto Viani et ses torses de 1952, l'anatomie humaine se réduit à des volumes simples et des surfaces lisses, fruit d'une audacieuse synthèse. En somme, un retour aux origines de la sculpture européenne : l'analogie n'est-elle pas flagrante avec les idoles cycladiques ?

Les trois salles du second étage poursuivent cette enquête sur la forme. Aux murs de la grande salle Linea sinuosa, sont accrochés d'immenses panneaux en grisaille de Giulio Aristide Sartorio, La Vita umana (1907). Cette ambitieuse série, par son format et son programme, développe une interrogation existentialiste qui la rattache pleinement au symbolisme ; le rapport à la sculpture s'établit grâce à une teinte minérale, ainsi que de récurrentes figures assises ou agenouillées en train de porter un élément architectural, découlant des ignudi de Michel-Ange sur la voûte de la Chapelle Sixtine. Une influence du génie italien toute aussi patente chez Rodin, magnifiquement représenté à la Ca'Pesaro par un grand plâtre des Bourgeois de Calais (1889) et un autre monumental du Penseur (1880/1904). La richesse des attitudes expressives de Rodin trouve d'intéressants contrepoints chez ses contemporains, tel Giuseppe Romagnol, auteur d'une Terra mater (1903), tendre maternité dont la pose agenouillée fait écho aux créations les plus apaisées du sculpteur français. Les recherches menées par Rodin se prolongent tard au XXe siècle : dans Grande figura accocolata (1961), Emilio Greco s'intéresse à un corps de femme recroquevillée, avatar de Celle qui fut la belle heaulmière destinée à La Porte de l'Enfer, et sa pose n'est pas tout à fait étrangère à celle de L'Adolescent agenouillé attribué à Michel-Ange. Autre expérience chère à Rodin, l'affirmation du fragment pour lui-même caractérise un Nudo di donna (disteso) dû à Napoleone Martinuzzi. D'une stylisation très épurée, ce plâtre reprend littéralement un guerrier couché du fronton ouest du temple d'Aphaïa à Égine (fin du VIe siècle/début du Ve siècle avant notre ère, Munich, Glyptothek), un des grands jalons entre les phases dite archaïque et classique de la sculpture grecque antique.


Forme-informe invite à la perte des repères usuels : Mare (1986) de Costas Tsocolis, avec son rocher encastré dans la toile, relève-t-elle de l'assemblage, de la peinture, de l'installation ou de la sculpture ? Les deux éléments pivotants de la composition géométrique abstraite dite Tela modellata (1965), imaginés par Marcolini Gandini, peuvent-ils être vraiment rattachés à la peinture de chevalet ? Les grandes planches en bois peintes par Emilio Vedova pour réaliser son Assurdo - diario di Berlino (1964), ne s'attaquent-elles pas autant au mur coupant en deux la capitale allemande, qu'aux limites traditionnelles des techniques artistiques ? Les hybridations ne sont pas toujours aussi ludiques : l'homme se voit laminer par la technologie chez Lorenzo Guerrini pour son Uomo e macchina vanno (1959) qui ne dissocie pas l'organique du mécanique, ce dernier adoptant des profils quelque peu agressifs dans Civiltà della macchina (1951) de Bruno de Toffoli. En pleine ère postmoderne, il est bien loin le temps où Marinetti et ses compagnons futuristes chantaient les louanges du progrès industriel...

Retour à une figuration plus habituelle pour terminer, à travers toutefois un paradoxe, le regard aveugle : Uno Sguardo cieco. L'absence momentanée ou la perte définitive de la vision a sans cesse questionné les arts plastiques, et la mouvance symboliste a répondu par la figure endormie. Déliquescents, les fameux visages de cire de Medoardo Rosso (La Signora X, 1896 ; La Signora Noblet, 1897) traduisent à merveille ce état de torpeur, dans lequel les traits paraissent s'amollir, comme s'ils se fondaient dans la gangue où les intègre le sculpteur. Adolfo Wildt privilégie une approche plus traditionnelle de la forme pour Martirologio (1894), buste directement issu des chefs-reliquaires du Quattrocento afin de renouer avec une ferveur mystique. En 1919, Arturo Martini se souviendra de cette typologie pour modeler sa Fanciulla verso sera, mais simplifie au maximum les traits, se rapprochant même la géométrie harmonieuse des visages de Modigliani.

Constater que la culture à Venise ne se cantonne pas à un passé indiscutablement prestigieux, mais englobe aussi une époque récente, réjouit toujours. Les achats des autorités publiques lors des Biennales du XXe siècle ont permis la constitution d'une collection remarquable. Et pourtant, une grande majorité des sculptures de l'exposition, tout comme les peintures des collections permanentes, ne va guère au-delà des années 1960. S'agit-il d'une volonté de circonscrire la création dite moderne à une période définie, ou bien l'art contemporain dans la Cité des Doges serait-il avant tout le fait de François Pinault ?

Le Forme del moderno Scultura a Ca'Pesaro. Da Medardo Rosso a Viani, da Rodin ad Arturo Martini, du 9 mars au 18 juillet 2010, Ca'Pesaro Galleria Internazionale d'Arte Moderna e Museo d'Arte Orientale, Santa Croce, 2076, Venise. Ouvert tous les jours sauf le lundi de 10H00 à 18H00 (fermeture de la billetterie à 17H00). Plein tarif : 6,50 euros ; réduit : 4 euros. Catalogue collectif (Fondazione Musei Civici Venezia, décembre 2009, 75 pages).

Références photographiques :
- Napoleone Martinuzzi, Pugile, 1939, bronze, 150x113,5x89 cm, Venise, Ca'Pesaro-Galleria Internazionale d'Arte Moderna
- Alberto Viani, Torso femminile, 1952, bronze, 136x63,5x62 cm, Venise, Ca'Pesaro-Galleria Internazionale d'Arte Moderna
- Accrochage de la section Forme-informe, au deuxième étage de la Ca'Pesaro
- Medoardo Rosso, La Signora Noblet, 1897, cire sur structure en plâtre, 68x50x27 cm, Venise, Ca'Pesaro-Galleria Internazionale d'Arte Moderna

jeudi 17 juin 2010

La Collection Motais de Narbonne. Tableaux français et italiens des XVIIe et XVIIIe siècles : exposition à Paris, Musée du Louvre

Quelques mois après l'accrochage de dessins appartenant à Georges Pébereau, les espaces du second étage de l'aile Sully accueillent de nouveau une collection privée, en l'occurrence des tableaux. Outre la présentation d'œuvres rarement montrées au public, le but de cette exposition est aussi de confirmer les rapports entre musées et collectionneurs. Ces deux mondes, loin de s'ignorer ou de se mépriser, ont tout à gagner d'entretenir des relations cordiales. Depuis toujours, le Louvre pratique dans ce domaine une politique exemplaire, récompensée par des legs ou des dons prestigieux_ si l'on se cantonne à l'art italien, l'ensemble de toiles baroques données par Fabrizio et Fiammetta Lemme en 1997, ou bien les dessins acquis en 2004 pour les musées de France grâce au mécénat du groupe Carrefour. Aussi généreux que leurs prédécesseurs, Guy et Héléna Motais de Narbonne offrirent en 2009 deux tableaux au Louvre. Peut-être est-ce le prélude à d'autres dons de leur part, à souhaiter vu la qualité des tableaux encore entre leurs mains. Si certaines toiles trouvent des correspondants honorables dans le musée parisien, d'autres seraient à même de combler les lacunes de collections publiques, pourtant déjà très riches. Et encore ne s'agit-il que d'une sélection autour des XVIIe et XVIIIe siècles en France et en Italie ! L'ensemble se montre homogène par ses sujets surtout historiques, et varié en termes de courants et de centres. Soit le reflet de la passion d'un couple de collectionneurs, qui achète par amour et non par spéculation.

La confrontation entre les deux écoles européennes illustre parfaitement la dette des Français envers l'Italie au XVIIe siècle, que les peintres viennent de Paris, Nancy ou Lyon. Tout comme son contemporain Simon Vouet, Nicolas Régnier se rallie dans ses jeunes années à la mouvance caravagesque. Son Jean-Baptiste dans le désert (1620) découle indiscutablement des compositions du maître sur le thème, avec les ombres lourdes, la restriction des tons où domine le rouge velouté du drapé, la chair un peu molle et l'expression hagarde du cousin du Christ. Peint probablement au début du séjour romain, la toile doit autant aux suiveurs immédiats de Caravage comme Manfredi, qu'aux Nordiques venus recueillir son héritage pictural. La manière large n'évoque-t-elle pas l'art d'un artiste d'Utrecht comme Gerrit van Honthorst ? S'il peint le même sujet, Nicolas Mignard, frère aîné de Pierre, puise au classicisme émilien, empruntant à Guido Reni sa tendresse des chairs et le regard songeur (Saint Jean-Baptiste au désert, vers 1650). Reni dont on trouve également un écho chez Lubin Baugin dans sa Vierge à l'Enfant (vers 1650-1660), d'une grâce un peu artificielle qui doit également à l'art de Fontainebleau. Quant à La madeleine pénitente (vers 1630-1638) de Jacques Blanchard, alias "le Titien français", elle évoque en effet les toiles sur ce thème du maître vénitien, à cause de ce sensualisme tactile sous l'apparence d'une image de dévotion ; s'y reflète aussi l'éloquence décorative de Pierre de Cortone, l'un des plus grands peintres alors actifs à Rome. En parlant de peinture vénitienne, on prendrait presque pour une œuvre de Piazzetta La Tentation de saint Antoine (vers 1679), qui est pourtant due à un Lyonnais du XVIIe siècle, Pierre-Louis Cretey, d'une liberté de touche peu commune dans la peinture de son temps. Hélas, on ne verra rien de Nicolas Poussin, le plus romain des peintres français, mais qu'à cela ne tienne : Saint Charles Borromée secouant les pestiférés (vers 1665-1670) montre le Montpelliérain Sébastien Bourdon habilement tirer parti du maître. Plans et groupes très structurés, grande rhétorique gestuelle et emploi rythmique des trois couleurs primaires sont médités avec intelligence sur l'exemple de Poussin.

Parmi les très nombreux artistes séjournant à Rome, la communauté lorraine compte de brillants noms, malgré la forte concurrence locale. Proche de Simon Vouet, avec lequel il a collaboré, Charles Mellin a privilégié une belle palette solaire, adéquate pour peindre Apollon (vers 1625-1627). La touche radieuse et onctueuse cohabite toutefois avec quelques ombres bien marquées. On ressent comme un écho de la contemporaine et dernière manière de Vouet en Italie : d'ailleurs, celui-ci et Mellin eurent comme mécène de choix le cardinal Francesco Barberini, neveu d'Urbain VIII, à qui appartint Apollon. Natif de Vic-sur-Seille, Charles Poërson a pourtant peu à voir avec le grand peintre originaire de cette cité, Georges de La Tour. Son Annonciation se tourne clairement, par contre, vers Poussin. Toute aussi charmante soit-elle, cette composition chargée et décorative n'atteint toutefois pas la force d'attraction, ni même l'exigence intellectuelle du maître de La Manne. A l'instar de la Ville éternelle, Naples aussi plaît aux Lorrains. Dans cette cité travaille François de Nomé, qu'on a souvent confondu avec le plus fantasque Didier Barra, un autre Messin, sous le pseudonyme de Monsu Desiderio. Ce qui n'enlève rien à l'étrangeté de son Intérieur d'église : si le genre rappelle certaines productions néerlandaises du temps, la dramatisation par le clair-obscur de l'architecture monumentale et la figure humaine réduite à une silhouette pourraient presque devancer Guardi, voire le romantisme.

Naples, une des villes les plus peuplées d'Europe au XVIIe siècle, attira divers talents. Caravage, dans sa cavale, y séjourna deux fois (en 1606-1607 puis en 1609-1610), orientant ainsi les maîtres locaux vers un vigoureux ténébrisme. Sans un tel primat, comment expliquer qu'Antonio De Bellis fasse surgir des ténèbres sa Sainte Dorothée (vers 1640) avant le martyre, comme si l'aura de la foi brillait à l'approche du supplice ? La grande attention accordée à la variation des reliefs sous la lumière n'est pas étrangère à la peinture de Ribera. De même, le vérisme fort de cette figure, guère idéalisée, se rapproche de l'art hispanique, omniprésent dans une cité alors sous la férule des Habsbourg de Madrid. Dans la seconde moitié du XVIIe siècle, cette suprématie du clair-obscur sera remise en cause, notamment par le chef de file de l'école napolitaine, Luca Giordano, d'abord acquis au style sombre de son maître Ribera. L'époque où il peint Le Christ devant Caïphe (vers 1692) se révèle décisive pour le passage à une palette diversifiée, où la couleur devient résolument expressive. Au rouge sanguin du juge répond le bleu froid de sa victime, opposition tempérée par le vert du soldat entre les deux protagonistes. Chronologiquement, la toile se situe entre les décors du Palazzo Medici-Riccardi à Florence (1682-1685) et ceux madrilènes du Buen Retiro (vers 16196-1697), quand Giordano élabore sa tonalité légère et aérienne, pré-rococo disent certains. Ses successeurs napolitains surent y trouver leur compte, tel Francesco de Mura, grand décorateur d'églises. Pareille activité requérait de petites esquisses préparatoires, que la sensibilité du temps considérait avec autant d'intérêt, si ce n'est davantage, que les œuvres définitives. Les teintes pastel dominent dans le modello pour Le Roi Salomon dirigeant la construction du Temple de Jérusalem (vers 1742), non sans quelques résurgences du XVIIe siècle dans des passages à la tonalité plus sourde ou certaines trognes.

Depuis quelques décennies, la production italienne (abusivement) dite baroque se voit mieux appréciée, avec la prise en compte de foyers auparavant délaissés par critiques et amateurs. Ainsi Florence, où la mode du clair-obscur se greffe à la qualité intellectuelle du dessin toscan. La synthèse s'opère parfaitement chez Alessandro Rosi et son David avec la tête de Goliath, sujet alors très en vogue pour opposer la douceur un peu maniérée du jeune prophète à la brutalité de la dépouille ensanglantée du géant, comme on le retrouve à Milan chez Francesco Cairo (David avec la tête de Goliath, vers 1640). Sujet allégorique s'il en est, Le Temps démasquant le Mensonge (vers 1682) de Francesco Bolti se rattache à tout un langage spectaculaire, habilement parlé par Bernin ou Rubens. Toutefois, cette manière quelque peu vibrante, filandreuse même dans la chevelure de Saturne, se démarque de la production florentine, et offre plutôt des similitudes avec la peinture du Vicentin Francesco Maffei. Étape essentielle dans les carrières de Rubens, Vouet, Van Dyck ou Puget, Gênes abritait par ailleurs des artistes inventifs, ainsi Gregorio de Ferrari. Le Repos pendant la fuit en Égypte (vers 1675) renoue avec la tendresse de l'expression développée par Corrège ou Parmigianino dans ce type de scène, mais la vigueur du geste pictural se rapporte bien au milieu génois, comme on le constate également avec Benedetto Castiglione.

La peinture d'histoire de la première moitié du XVIIIe siècle a souvent été réduite à une tendance décorative l'emportant sur la leçon morale. Il est vrai que le sujet servit souvent de prétexte à la démonstration d'une facture vive et enlevée, tel François Lemoyne lorgnant du côté de Sebastiano Ricci (Jacob et Rachel au puits). Même pour un sujet aussi grave qu'Antiochus Épiphane ordonne le massacre des Macchabées, prime une manière virevoltante. Les toiles respectives de Jean-Baptiste Marie Pierre et Michel-François Dandré-Bardon, probablement destinées à un concours de l'Académie de Saint-Luc à Rome en 1738, ramènent la peinture d'histoire à un déploiement de touches furtives, de gestes emphatiques et d'architectures théâtrales. Pourtant, la volonté de moraliser le "grand genre" n'avait jamais été perdue : c'est au tout début du XVIIIe siècle que remonte La Mort d'Arria, où le Toulousain Antoine Rivalz fait preuve d'une profonde gravité, modérée par une retenue tout racinienne. La remarque vaut aussi pour l'Italie, puisque le Crémonais Donato Creti entend prolonger, non sans quelque application laborieuse, la grande leçon bolonaise du Seicento avec La Vierge de l'Apocalypse entre saint Vincent Ferrier et saint Antoine de Padoue (vers 1730-1745). Il faut toutefois attendre les années 1740 pour que la noblesse emphatique de l'Histoire, en réaction aux légèretés rocaille, domine véritablement la peinture française. Pour son premier tableau connu, Le Sacrifice d'Iphigénie (1749), le jeune Gabriel François Doyen garde la touche bien crémeuse de Boucher, appliquée à un drame antique. Le thématique du sacrifice devient alors à la mode, et même le voluptueux Fragonard s'y essaya plus tard. La majesté de Rome intensifie cette volonté chez deux peintres méridionaux : Pierre-Hubert Subleyras en quête d'une éloquence simple mais efficace comme en témoigne son Annonciation (vers 1740), et Joseph-Marie Vien, qui médite la peinture bolonaise pour aboutir à l'autorité formelle de son Saint Jérôme en prière (vers 1755). Il fallut toutefois attendre le premier séjour romain du meilleur élève de Vien, Jacques-Louis David, pour que s'opère une profonde évolution.

Rome, par où tout commence et tout termine, sous forme d'énigme accrochée sur les cimaises. Plus précisément, un tableau donné à l'école romaine vers 1620-1640, Un docteur de l'église orientale_ représentation de saint isolé analogue au Saint Pierre (vers 1650) de Guerchin, remarquable par son accord entre le bleu chaud et l'orangé proche du roux, assimilation très personnelle du chromatisme vénitien. L'identité de l'artiste, davantage que celle du personnage dépeint, pose problème. Cette ignorance s'avère d'autant plus irritante que la toile n'est rien moins qu'un chef-d'œuvre, d'une matière richement veloutée, le visage du saint dessiné avec une délicatesse jamais mièvre. Nul doute que l'auteur de ce tableau se confonde avec un grand peintre : Roberto Longhi, attributionniste d'une remarquable acuité, avait même avancé le nom de Velázquez ! Un jour viendra où un autre historien de l'art saura trouver la paternité correcte, et d'ici là les collections privées auront encore livré d'autres beaux mystères...

La collection Motais de Narbonne. Tableaux français et italiens des XVIIe et XVIIIe siècles, du 25 mars au 21 juin 2010 Musée du Louvre (aile Sully, 1er étage, salles 20 à 23), 99 rue de Rivoli, 75001 Paris. Ouvert tous les jours sauf le mardi de 09H00 à 18H00, nocturnes le mercredi et le vendredi jusqu'à 21H30. Tarif : accès avec le billet pour les collections permanentes. Catalogue sous la direction de Stéphane Loire (Musée du Louvre Éditions/Somogy, 2010, 136 pages, 25 euros).

Références photographiques :
- Nicolas Régnier, Saint Jean-Baptiste, vers 1620, huile sur toile, 95,5x74 cm, collection Héléna et Guy Motais de Narbonne
- Francesco Cairo, David vainqueur de Goliath, fin des années 1630, huile sur bois, 49,2x38,2 cm, collection Héléna et Guy Motais de Narbonne
- Gregorio de Ferrari, Le Repos pendant la Fuite en Égypte, vers 1675, huile sur toile, 98,7x75 cm, collection Héléna et Guy Motais de Narbonne
- Joseph-Marie Vien, Saint Jérôme en prière, vers 1755, huile sur toile, 160x129 cm, collection Héléna et Guy Motais de Narbonne

dimanche 14 mars 2010

Éloge du négatif les débuts de la photographie sur papier en Italie (1846-1862) : exposition à Paris, Petit Palais

Les expositions parisiennes sur l'art italien du XIXe siècle se multiplient sans heureusement se ressembler. Avant une rétrospective Giuseppe de Nittis à l'automne, le Petit Palais revient sur les débuts de la photographie dans la péninsule_ soit entre l'invention du procédé et l'unité nationale menée par Garibaldi. Époque ô combien riche pour les arts et l'Histoire, mais dont la complexité peut paraître quelque peu rebutante. C'est pourquoi le propos est tout d'abord technique, afin de guider le visiteur guère familier des différents procédés. Alors que le français Daguerre mit au point un dispositif assez contraignant, défini par une épreuve unique et une sujétion encore forte aux médias traditionnels, l'anglais Talbot inventa en 1841 le calotype. La "belle image" peut être obtenue en plusieurs exemplaires, par tirage sur papier salé à l'aide d'un négatif. Les étapes de fabrication sont explicitées par une série de clichés et un film autour de Martin Becka : d'origine tchèque, cet ancien reporter installé en France s'est pris de passion pour la photographie ancienne, au point de développer lui-même en atelier ses négatifs suivant les méthodes du XIXe siècle. Il explique le déroulement de son travail avec autant d'enthousiasme que de pédagogie, renouant avec l'esprit des "pionniers".


Souvent peintres de formation, les premiers photographes de calotype privilégient cette technique pour la texture veloutée et les nuances picturales qu'elle permet. Ils "trichent" d'ailleurs, en retouchant au pinceau le négatif pour accentuer les contrastes sur le positif. La quantité variable d'or utilisée lors du virage permet aussi de modifier nettement les tons du cliché, du brun au noir. Les rapports avec la peinture se révèlent également dans les sujets comme les compositions. Les vues plongeantes sur Rome prises par Alfred-Nicolas Normand ou Frédéric Flanchéron, masses bien géométriques calées entre les cyprès jusqu'à l'horizon, présentent des analogies frappantes avec des tableaux de Corot. Les humbles figures isolées de Giacomo Caneva, par le détail de leur vêtement et le cadrage les monumentalisant, semblent des contrepoints photographiques aux tableaux de Millet, tout comme le Pifferaro (1846) d'Amélie Guillot-Saguez_ curieusement, on parle assez peu du rôle des femmes dans l'essor de la photographie_ possède une farouche noblesse peu éloignée de l'esprit romantique.

Loin d'être un simple atout mécanique, la reproductibilité visait deux buts précis, à savoir immortaliser un site pour les touristes et inventorier les richesses patrimoniales du territoire italien. Dans la ligné du Grand Tour, des "curieux" français, anglais ou allemands voyagèrent avec leur objectif à portée de main ; certains se lancèrent même dans des projets démesurés, tel Eugène Picot et L'Italie monumentale (1851-1853) en cinq fascicules. Commercialement peu concluante, l'entreprise reste cependant un jalon dans l'histoire de la photographie par son ambition encyclopédique et la finesse des œuvres, de la retouche des négatifs aux nuances du positif. Bien que moins nombreux, les Italiens eux-même se lancèrent dans pareil périple, parcourant leur nation sur le point de s'affirmer. L'un des premiers fut Giacomo Caneva avec son Album de photographie italienne (vers 1852), qui toutefois se cantonne essentiellement aux vestiges romains et aux trésors du Vatican. Après la disparition de Caneva en 1865, certains de ses négatifs servirent dans les années 1870 à Lodovico Tumicello, pour des développements sur papier. Quant à Luigi Sacchi, sa série des Vedute, monumenti e costume d'Italia (1852-1855), donc à la fois esthétique et ethnographique, opte pour des grands formats à la mise en page soignée, à même d'exalter la grandeur passée de Rome en plein Risorgimento. Avec Naples, dont la baie majestueuse et les curiosités archéologiques captivent James Graham, Venise retient la plus grande attention des premiers photographes. Nul ne s'étonnera que les édifices bordant le Grand Canal, assemblage mouvant de couleurs et de motifs caressés par le soleil et les eaux, se retrouvent sur les clichés les plus réussis : pris tous deux vers 1855, le palazzo Cavalli-Franchetti par Giuseppe Cimeta et le Palazzo Doria par Domenico Bresolin, avec les beaux effets de fondus dans les reflets et la diffraction des formes solides de l'architecture, renouvèlent l'iconographie de la vedute entre Canaletto et Monet. Du même Bresolin, toujours dans la Cité des Doges, l'abside de l'église des Frari (vers 1855) revêt aujourd'hui une valeur documentaire, tant les abords de la célèbre basilique franciscaine ont depuis changé. Pareil pour le Forum romain vu par Thomas Sutton (1851-1853) avant les grandes fouilles : entre l'arc de Titus et les vestiges du temple de Saturne, s'étend une grande plaine, sous laquelle dorment des ruines glorieuses...


Cette aventure prit fin ou plutôt mua sous le coup de bouleversements fondamentaux. Alors que l'Italie parachevait son unité, la photographie se perfectionna avec l'emploi d'un support de verre, plus précis mais aussi plus fragile. C'est pourquoi une partie des voyageurs resta fidèle au tirage papier, entre autres Léon Méhédin publiant en 1859 Campagnes d'Italie, après avoir accompagné Napoléon III jusqu'à Valeggio. Les conditions mêmes de la pratique photographique changèrent aussi, passant de l'expérience en amateur à une réalisation industrielle exigeant contrôle et précision. La netteté absolue des tirages Alinari correspond à ces nouveaux critères, tout comme la constitution d'une maison pour diffuser les clichés auprès du plus grand nombre. Un nouveau chapitre de l'histoire de la photographie s'ouvrait, non moins prometteur.

L'exposition sera ensuite présenté à Florence, Museo Nazionale della Fotografia, 10 septembre-24 octobre 2010

Éloge du négatif les débuts de la photographie sur papier en Italie (1846-1862), du 18 février au 2 mai 2010, Petit Palais-Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Avenue Winston Churchill, 75008 Paris. Ouvert tous les jours sauf le lundi et les jours fériés de 10H00 à 18H00. Plein tarif : 6 euros ; réduit : 4,50 euros ; demi-tarif : 3 euros ; gratuit jusqu'à 13 ans. Catalogue collectif (Éditions Paris Musées, 256 pages, 37 euros).

Références photographiques :
- Gustave de Beaucorps, Rome, San Pietro in Vincoli © collectionprivée
- Giacomo Caneva, Rome, Temple de Vesta
© FratelliAlinari
- James Graham, Vésuve, coulée de lave de 1858-60
© FratelliAlinari
- Giacomo Caneva, Ludovico Tuminello, Rome, arc de l'aqueduc de Claude © FratelliAlinari

dimanche 21 février 2010

Orfèvrerie, peinture et gastronomie : le Piémont à Paris

Une grande campagne de promotion touristique de la région piémontaise est lancée à Paris pendant tout le mois de février 2010. A côté de diverses opérations qui vantent les terres du borsalino, de la bataille de Marengo ou du champion cycliste Coppi, doivent être signalées deux expositions à thème artistique. La première, à la mairie du Ve arrondissement, propose une introduction à l'art de Felice Giani (1758-1823), peintre originaire du Piémont qui eut notamment une importante en France. Dans ce pays, l'artiste reste pratiquement méconnu, alors que d'importantes études lui ont déjà été consacrées en Italie : une véritable somme (en deux volumes, totalisant 1003 pages en tout !) publiée chez Electa en 1999 par Anna Ottani Cavina restitue l'intégralité de l'œuvre de Giani tout en évoquant son contexte. Plus récemment, se tint une exposition Felice Giani dipinti e disegni da collezioni private (San Sebastiano Curone, 18 juillet-12 septembre 2004), dont un grand nombre de tableaux ou dessins sont également montrés à Paris. La rétrospective française a trait également aux liens unissant la France à l'Italie, dans le cadre en l'occurrence du néoclassicisme. Le grand paradoxe du retour à l'antique à la fin du XVIIIe siècle réside dans le fait que Rome est bel et bien son creuset mais avec la contribution décisive d'artistes étrangers : sans négliger le rôle joué par Canova et Piranèse dans l'élaboration du néoclassicisme, l'action de Thorvaldsen, Hamilton, Mengs ou David fut tout aussi notable. Plus encore, l'hégémonie davidienne dans la peinture européenne autour de 1800 fit de Paris la capitale des arts au détriment progressif de la Ville éternelle. Face à ce constat, réhabiliter l'activité des maîtres italiens de la fin du XVIIIe siècle et du début du XIXe siècle permet de relativiser l'impression de déclin laissée par la production d'outre-monts après l'effervescence baroque.



En dépit de cette bonne volonté, on peut regretter le nombre restreint d'œuvres, dont le contingent le plus fort est celui des gravures d'interprétation, d'après des copies dessinées par Giani de tableaux de maîtres anciens. De même, les fréquentes erreurs et maladresses de traduction rendent pénible la lecture des panneaux d'introduction, pourtant fort instructifs : on y apprend que Giani occupait une place de choix dans le microcosme romain qui se retrouvait au Caffè Greco, notamment Canova et Camuccini qui signèrent son diplôme de l'Académie de Saint-Luc. L'artiste s'illustra également dans la décoration des Procuratie Nuove de Venise en 1807 ou participa à la réalisation de l'arc de triomphe érigé pour l'entrée de Napoléon à Bologne en 1805. Le milieu français impérial fut en effet favorable à Giani, protégé par Antonio Aldini, ministre italien à Paris. L'artiste séjourna probablement dans la capitale française en 1801, avant de décorer la villa du comte Aldini à Montmorency. Une idée de sa production ornementale est donnée par toute une série de dessins de figures ailées, putti ou victoires, à portée souvent allégorique. Outre la diversité de manière entre le crayon, ferme, et l'encre, plus elliptique, la main varie aussi le traitement des corps, de la grâce un peu évaporée aux contours plus assurés mais aussi plus inquiets. On retrouve là toutes les nuances de la création à la fin du XVIIIe siècle, de la légèreté aimable propre à Thomire et Thorvaldsen aux formes plus sévères de David et Blake. Psyché adorée comme Vénus se rapproche même de l'exigence de Flaxman dans la pureté des profils et l'agencement des formes.Cette volonté d'expressivité du trait n'est pas moindre dans les gravures illustrant Le Notti romane (1804) d'Alessandro Verri, d'après les dessins de Giani. Le recours à l'aquatinte permet de créer une ambiance à la limite des fantasmagories de Füssli et ses ténèbres tragiques, d'où jaillissent le meurtre et l'effroi au temps des anciens Romains. Les deux ensembles de dessins appartenant à Vittorio Sgarbi (un recueil de voyages et des illustrations de Dante) révèlent aussi une hésitation fascinante entre le culte du beau antique et le doute sur sa suprématie, interrogation propre à ces temps troublés.

Parmi les quelques toiles exposées, certaines constituent de véritables découvertes. C'est le cas d'une Vierge à l'Enfant trônant entre saint Bernard et saint Jean-Baptiste enfant, composition mesurée et un peu froide suivant les nouvelles doctrines esthétiques ; mais persiste néanmoins un esprit baroque dans le clair-obscur, dans le coloris décoratif de l'habit de la Madone et la vigueur du pinceau dans les plis du cistercien. L'hommage de Giani à l'art du XVIIe siècle se fait évident dans des œuvres telles que La Sainte Famille, faisant du sujet religieux une vraie scène de genre avec une brièveté dans l'exécution encore proche du rococo ; Ancor io fui in Arcadia, sujet ayant trait à la découverte de la mort par les bergers d'Arcadie et brillamment traité par Poussin ou Guerchin, sous le titre Et in Arcadia ego. Guerchin fut d'ailleurs copié par Giani, qui reprit sa Sybille persique (1647, Rome, Pinacothèque Capitoline), en atténuant quelque peu le sfumato ombrageux du peintre de Cento sans rien changer au contraste puissant et dynamique entre le bleu profond et le rouge sanguin. Ce regard, alors déjà rétrospectif, sur l'art du passé trouve son expression la plus franche dans la série de dessins réalisés par Giani d'après les œuvres du Louvre. Ou plutôt le Musée Napoléon, abritant alors la collection la plus riche jamais constituée, grâce aux "prises de guerre" artistiques des armées françaises dans toute l'Europe. Ces dessins donneront lieu à des gravures illustrant Le Musée Français publié entre 1803 et 1809, puis Le Musée Royal entre 1816 et 1818, soit le Louvre après le Congrès de Vienne. Des collections constituées sous le Premier Empire, furent notamment copiés La Déposition de Caravage (Le Vatican, Pinacothèque), L'Annonciation d'Orazio Gentileschi (Turin, Galleria Sabauda), Le Christ avec les quatre évangélistes de Fra Bartolommeo (Florence, Palazzo Pitti), pour ne citer que les tableaux italiens temporairement conservés à Paris avant de revenir de l'autre côté des Alpes. Voilà comment s'achève ce parcours fort intéressant mais qui pourrait laisser sur sa faim : dans ce cas, direction l'étage supérieur où le visiteur pourra se livrer à une autre forme de délectation. Après le plaisir de l'œil, le goût est à l'honneur avec une dégustation gratuite de produits gastronomiques de la région du Monferrato, d'où était issu Giani. Vin, chocolat et grissini offrent un délicieux complément culturel aux beaux-arts.

De l'autre côté de la Seine, au Petit Palais, l'itinéraire piémontais se poursuit, au milieu des joyaux. La création italienne de luxe n'a plus de preuves à faire, si l'on songe notamment au domaine de la mode. Le travail des pierres et matériaux précieux connaît pareille vitalité, à l'exemple de Valenza. Depuis 1945, les entreprises de bijouterie autour de cette cité piémontaise se sont regroupées dans l'Associazione Orafa Valenzana, afin de mieux diffuser leur production. Un échantillon significatif de ces objets précieux permet de constater que l'habileté technique n'y égale que l'invention des formes. Aux motifs géométriques simples des bijoux Ceva, se substitue bien souvent une inspiration véritablement naturaliste. Les bracelet et montre-bracelet en forme de serpent réalisés dans les années 1960 par l'atelier Carlo Illario e Fratelli ont à voir avec la résurgence Art Nouveau de l'époque, mais la tendance se prolonge jusque dans les années 1980 avec les broches rose ou papillon de Carlo Barberis. Quant au Gladiolo (glaïeul) Garavelli Aldo, c'est une imitation aussi sobre que convaincante de cette fleur, où le modèle charmant de la nature est délicatement imité en or blanc et or jaune_ faut-il y voir un lointain avatar des fameuses roses des orfèvres siennois du Moyen Âge ?

Ce savoir-faire exigeant et spectaculaire porta ses fruits puisque les joailliers de Valenza remportèrent de nombreuses fois le Diamonds International Award, sous l'égide de la célèbre maison De Beers. Parmi les pièces récompensées, outre les colliers et bagues aux courbes souples soulignées par les rangées scintillantes de diamants, se détache Night and Day. Ce volumineux bracelet possède de vrais accents lyriques, tant par son nom (commun à des œuvres musicales de Cole Porter et Léo Ferré, ou poétique de Robert Louis Stevenson) que par l'harmonie dynamique des textures_ l'émail bleu, dense et profond, sur lequel surgissent les astres en or jaune et or blanc, parsemés de brillants, évocation des étoiles. Entre 1967 et 1971, la maison Frascarolo & C se lança avec succès dans l'édition de bijoux animaliers. Au sein de ce bestiaire se mêlent pièces humoristique_ la broche Bassolto (basset), dont le museau allongé, le corps étiré et les courtes pattes sont taillées dans le même morceau d'onyx_ et motifs plus racés de fauves : bracelet Leone dont le fermoir est articulé par une gueule de lion, pendentif Ghepardo détachant le pelage tacheté sur les veines de l'œil de tigre, bague Tigre et ses subtiles nuances de blanc et noir, or et vermeil.



Quelle que soit son répertoire et ses matériaux, chaque objet fut élaboré de la façon la plus aboutie qui soit, en employant simultanément l'émail, le métal et les pierres pour se rapprocher de la vivacité animale. La conception de ces bijoux bénéficie d'ailleurs en amont de dessins aquarellés pour le coloris et l'articulation, ainsi que de modèles en argent à l'échelle, pour saisir le volume et éventuellement la polychromie. Certains de ces projets n'ont jamais été exécutés, restant à l'état de propositions pour les bijoutiers. Cette importance du disegno, chère à l'art italien, ne fait-elle pas de ces pièces de véritables œuvres d'art ?

Felice Giani. Maître du néoclassicisme italien à la cour de Napoléon, du 8 au 28 février 2010, Mairie du 5e arrondissement, 21 place du Panthéon, 75005 Paris. Ouvert du lundi au vendredi de 10H00 à 18H00, samedi et dimanche de 11H00 à 18H00. Entrée libre. Catalogue par Vittorio Sgarbi, Vincenzo Basiglio, Davide Tolomelli (Fondazione Cassa di Risparmio di Alessandria, 2010, 180 pages, 30 euros).

Valenza ou la joaillerie italienne A la découverte de Valenza : joaillerie, bijouterie et orfèvrerie. Le style italien dans le courant du XXe siècle, du 8 au 28 février 2010, Petit Palais-Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Avenue Winston Churchill, 75008 Paris. Ouvert tous les jours sauf le lundi et les jours fériés de 10H00 à 18H00. Entrée libre (avec l'accès gratuit pour les collections permanentes). Catalogue sous la direction de Lia Lenti (2010, 143 pages).


Références photographiques :
- Felice Giani, Psyché adorée comme Vénus (esquisse préparatoire pour le décor de la galerie de l'étage noble du Palazzo Laderchi à Faenza), 1794, dessin à la plume, encre brune et aquarelle colorée, 10,4x59,5 cm, collection privée
- Felice Giani, Du Manuscrit Poétique, Chant I : le Poète assiste impuissant à la chute de beaucoup de monde dans le gouffre, en présence de trois enfants, pendant que dans le ciel apparaît une figure féminine gracieuse "il y en arriva tellement que mon interprétation limitée ne pourra répéter combien j'en vis et comment ils tombèrent dans l'abîme obscur" (Manuscrit Sgarbi, Voyages philosophique et poétique, voyageurs amoureux, voyage amoureux), dessin à la plume et à l'encre, 17,8x13 cm, collection Vittorio Sgarbi
- Felice Giani, Vierge à l'Enfant trônant entre saint Bernard et saint Jean-Baptiste enfant, huile sur toile, 180x120 cm, Tortona
- Damiani, Night and Day, 1994, or blanc, or jaune, émail bleu, brillants, collection Damiani